🌨️ Où est la neige chez vous ?
Toutes nos organisations sont des stations de sports d’hiver de moyenne montagne. Collectivités, aménageurs, bailleurs sociaux, promoteurs, agences d’architecture, bureaux d’études… nous avons tous notre propre or blanc, cette ressource vitale dont nous dépendons sans même nous en apercevoir. Le foncier agricole, le béton, la logistique mondialisée, l’argent pas cher, la mobilité automobile, l’eau, la vue sur la mer, les étés joyeux sont autant d’acquis, d’évidences, des filons inépuisables. Nos neiges éternelles. Mais entre les crises d’aujourd’hui et les orages qui grondent au loin, impossible de faire encore semblant de croire en leur permanence. C’est pourtant maintenant qu’il faut faire le choix entre acheter une nouvelle paire de canons à neige pour gagner du temps, ou commencer à penser à la suite. Alors, et vous, « où est la neige chez vous ? »
Répondre à cette question, c’est sortir de l’aveuglement et du déni, et commencer à vivre avec le vertige. « Le vertige, c’est de sentir que malgré les transitions dont on parle, on continue à mettre en œuvre un modèle qui n’est pas tenable » m’expliquait il y a peu un élu local. C’est la hauteur des enjeux qui provoque le vertige, comme pour cet entrepreneur déjà très engagé, confronté aux mauvaises nouvelles du monde : « je croyais que je savais, mais je ne savais pas ». C’est aussi la réaction de cette technicienne face à une équation carbone insoluble : « On ne sait vraiment pas comment on peut y arriver ». Le vertige, c’est la somme de la conscience de l’ampleur des changements à mener, de l’importance de nos responsabilités et de l’incertitude sur le chemin à suivre. Et ce n’est pas qu’une étape inconfortable du processus. C’est un état dans lequel nous devons apprendre à vivre durablement, tout en continuant d’avancer. Nous allons nous y acclimater, car nous ne pouvons ni conserver le cap ni attendre l’effondrement.
« Où est la neige chez vous ? » Cette question, c'est celle que pose souvent Emmanuel Bonnet dans ses interventions. Enseignant-chercheur à l’ESC Clermont Business School, et membre du laboratoire CleRMa, il travaille à la fois dans des stations de sport d'hiver qui s'inventent un futur au-delà de la neige et dans des organisations qui s'engagent dans leur redirection. C'est avec lui que nous avons rendez-vous cette semaine.
– Sylvain Grisot (Linkedin / Bluesky / X)

🗓️ 18 octobre, en ligne. « Pour une transition “juste” des territoires », une table ronde organisée par JS, centré sur les quartiers populaires. Leurs habitants sont ceux qui pâtissent le plus des impacts du dérèglement climatique, alors même que leur empreinte carbone est bien en dessous de la moyenne française. (Inscription)
📻 Le Tournant. Voici une analyse très complète des enjeux de l’électrification de la voiture, et une belle occasion de découvrir le podcast « le tournant » de la RTBF. Vous ne ferez pas de grande découverte, mais cela permet de lever quelques ambiguïtés : impossible de prédire l’avenir, mais celui où toutes nos voitures sont transformées en véhicules à hydrogène ou électriques est un mirage. (RTBF)
🖍️ Leviers. Intéressant entretien avec la sociologue Sophie Dubuisson Quellier, membre du haut conseil pour le climat, sur les leviers du changement. Alors qu’on sent les limites du levier technologique, notre société a du mal à mobiliser la régulation comme moteur du changement, et fait tout reposer sur les changements de comportements individuels. C’est insuffisant à l’évidence, tant que les questions organisationnelles ne seront pas abordées de front. Mais changer la structuration de nos sociétés prendra évidemment du temps. (Claire-iT)
📖 How Buildings Learn: What Happens After They're Built par Stewart Brand (Penguin books, 1995) Voilà un ouvrage à part, déjà ancien mais toujours pas daté, qui regarde les bâtiments qui nous entourent d’un œil différent. Il est ici moins question d’espaces que de temps, ce temps long de la vie d’après la réception d’un bâtiment, qui fait l’objet de beaucoup moins d’attention que ceux de sa conception ou de sa construction. C’est pourtant leur vieillissement qui permet de distinguer les bâtiments bien conçus qui savent s’adapter aux changements des besoins de leurs occupants, de ceux qui seront frappés d’une obsolescence accélérée. Stewart Brand propose de penser nos bâtiments en couches distinctes (structure, peau, aménagement…) et d’assurer à chacune la capacité d’évoluer sans impacter les autres. Il développe aussi l’idée particulièrement inspirante d’une programmation scénarisée qui laisse les futurs de nos bâtiments ouverts.

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