💸 Sortir le sol de l'équation

💸 Sortir le sol de l'équation
Source : by Franck Seuret (Pixabay License) Résidence Les Albatros par Néotoa 

Il a fallu une pandémie mondiale pour que certains réalisent que celles et ceux qui font tourner nos villes et nos hôpitaux ne peuvent plus se payer un logement décent au cœur des métropoles attractives. Ils ont donc désormais un nom, ces fameux travailleurs essentiels, mais toujours pas de logements. Alors, après une grosse décennie d’inflation foncière qui a transformé ce bien vital en denrée de luxe, il serait temps de trouver des solutions. Car la rareté et l’explosion des prix repoussent toujours plus loin les ménages aux revenus normaux qui cherchent à devenir propriétaires et ont envie d’un petit bout de jardin pour leurs enfants. Il y a peut-être du rêve pavillonnaire dans tout ça, mais surtout la réalité crue de marchés immobiliers qui laissent une partie des Français de côté.

Le BRS proposé par les OFS est peut-être une solution. C’est déjà l’illustration parfaite de l’appétence de la profession pour les acronymes abscons, mais passons. Tout cela n’est finalement pas si compliqué. L’idée est que les ménages soient propriétaires de leur logement, mais pas du sol sur lequel il est construit, qui reste propriété d'un Organisme Foncier Solidaire (l'OFS). Ce cher foncier sort donc de l’équation d’achat qui s’en retrouve notablement réduite, au point d’en devenir abordable. Pour bénéficier de ces conditions favorables, le ménage doit justifier de revenus modestes, s’acquitter d’une location souvent minime du sol via un Bail Réel Solidaire (voilà le BRS) et se soumettre à des clauses antispéculatives. Est-ce enfin la solution à tous nos problèmes ? Évidemment non, mais c’est une solution en plus face aux difficultés à produire des logements abordables dans certains secteurs. Nous avons besoin d’une caisse complète d’outil efficaces, pas d’un couteau suisse miraculeux.

C’est aussi une bonne illustration des potentiels de la dissociation des propriétés du sol et du bâti, qui peut être une voie efficace pour gérer de façon plus cohérente et durable les usages de nos sols. Car il n'y a pas que le logement abordable qui pose problème. Les rez-de-chaussée commerciaux des centres, les franges agricoles des villes, les zones d’activité économique sont autant d’espaces dont la gestion par le seul marché laisse pour le moins à désirer. Ce sont pourtant des exemples d’usages essentiels pour le bien de tous, et donc des sols communs dont l’importance justifie de les mettre entre les mains d’opérateurs collectifs qui gardent un œil sur le temps long. Nul besoin d’en passer par des innovations juridiques radicales, (presque) tous les outils sont là. C’est d’une rupture culturelle dont il est question, pour cesser de considérer le sol comme un bien de consommation ordinaire.

— Sylvain

PS : Ma première tribune 📢 pour la Lettre du cadre territorial est publiée, et son titre ne devrait pas vous étonner : "La seconde vie de la ville".

OFS/BRS ? Quand le logement se libère du foncier.

Et si on dissociait le sol du bâti pour proposer des logements abordables ? On en parle avec Hélène Reynaud, consultante en immobilier résidentiel et aménagement. Petite mise au point sur les BRS et les OFS !

Lire et écouter l'interview

📆 Jeudi 3 février. Colloque "Les nouveaux horizons de la cohésion des territoires". Sylvain interviendra dans une table ronde sur "Les villes moyennes, nouvel eldorado ?". N'hésitez pas à vous inscrire ! (ANCT)

🎙️ Podcast. L’écoanxiété, une maladie qui touche la moitié des jeunes ? Un mal sans doute, mais pas une maladie. Une réaction parfois handicapante, mais raisonnable face à la marche du monde. La solution est sans doute dans l’action et la politisation de la crise, pas dans les médicaments. (L'heure du monde)

⛵ Météo marine. Une initiative intéressante afin de mieux comprendre le changement climatique depuis l'ère industrielle : retranscrire les registres météo des marins qui ont traversé l'Atlantique ou l'océan Indien dans les années 1860-70s. Impressionnant. (Weather Rescue At Sea)

Impact fictionnel. Entretien de Yannick Roudaut, auteur et éditeur à la Mer Salée, dont on a déjà parlé dans cette newsletter. Il revient sur son dernier ouvrage Quand l’improbable surgit, un autre futur revient dans la partie, dédié à la puissance de l'improbable, comme chemin potentiel de la résilience. Il nous rappelle qu'il n'est plus du tout crédible que le monde dans lequel nous vivons ressemble à celui de 2040 et que, entre deux références cinématographiques, la fiction a un impact fondamental pour changer le réel. (Bande à part)

📖 Petit traité du jardin punk, Eric Lenoir (Terre Vivante, 2019) Difficile de dire que ce petit livre est un guide de jardinage. Il énoncerait des règles, alors qu'Eric Lenoir invite au contraire à délaisser les normes pour investir des jardins de tous types. Destiné à celles et ceux qui se lancent dans l'aménagement de jardins publics comme privés, c'est un appel à lâcher prise et à laisser la nature faire. Si les pistes tracées peuvent frustrer ceux qui cherchent le mode d'emploi de leur paysage, elles permettront sans doute aux autres de l'aborder par un pas de côté, en commençant par écouter le déjà-là. Sans doute une bonne piste.

dixit.net est une agence de conseil et de recherche urbaine. Tous les mercredis, nous décryptons dans notre newsletter les grands enjeux de la ville et de ses transitions. Si vous la lisez pour la première fois, c'est le moment de s'abonner à cette newsletter.